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Ambivalence de la figure d'Alexandre le Grand dans la tradition juive

(2020)

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Parmi les nombreuses figures historiques qui fascinent, Alexandre le Grand occupe une place à part. Ce roi macédonien qui a mené, en son temps, l’expédition militaire la plus ambitieuse, la plus risquée, contre le puissant Empire perse, est le protagoniste d’une formidable épopée, que rois, empereurs, sultans et califes ont médité dans leur propre pratique du pouvoir ou de l’art de la guerre. Car c’est contre des forces que tous s’attendaient à voir le submerger que le Macédonien a triomphé, au fil de batailles dont pas une seule ne s’est conclue sur une défaite d’Alexandre : bien au contraire, contre des ennemis en bien plus grand nombre, le Grec a su mener d’habiles batailles à l’issue toujours victorieuse ; autant d’accomplissements qui, sans conteste, l’installent parmi les plus grands stratèges militaires connus des historiens. Nombreux sont les peuples qu’Alexandre inspire : des légendes antiques sur le Macédonien aux Romans européens du Moyen-Âge, en passant par les écrivains de langue syriaque... les siècles passent mais l’admiration pour cette immense figure historique demeure. Chacun y voit l’incarnation des valeurs qu’il considère nobles : la conquête, la victoire, la force ; ou au contraire l’intelligence, l’ouverture, la subtilité. Une fiévreuse production littéraire continuera d’alimenter, génération après génération, de nouveaux discours sur cet invincible conquérant qui a redéfini les bornes du possible. Ses exploits, connus de l’Europe à l’Asie, sont de véritables jalons historiques ; dans bien des domaines, que ce soit l’urbanisme, la stratégie militaire, l’organisation politique ou encore la diplomatie, le Macédonien, en bousculant les codes de la société grecque au -IVème siècle, a redéfini des standards qui allaient s’imposer et constituer, en grande partie, ce que l’on nomme depuis « hellénisme ». Parmi ces nombreuses civilisations qui ont révéré Alexandre et se sont intéressées à lui en lui consacrant des œuvres littéraires, les Juifs ne sont pas en reste. En effet, dès le début de la période que l’on appelle hellénistique (-323 / -30), on observe une récurrence du motif d’Alexandre dans la culture juive : non seulement des occurences autour du Macédonien existent dans la tradition extrabiblique du judaïsme, mais ce dernier est également présent dans des récits historiographiques et même vétérotestamentaires, interagissant, dans des épisodes variés, avec des représentants du peuple d’Israël. Or, on remarque que, dans cette diversité d’épisodes, le portrait qui est fait d’Alexandre le Grand n’est jamais strictement uniforme : en effet, il est parfois craint, ou au contraire considéré comme un protecteur ; on le voit même sévèrement condamné par endroits, mais être pourtant particulièrement loué et honoré à d’autres occurrences.  Comment expliquer l’ambivalence de la figure d’Alexandre le Grand dans la tradition juive ? C’est la question que nous nous proposons de traiter dans cette présente étude. Pour tenter d’y répondre, notre réflexion s’articulera en quatre temps : Premièrement, nous présenterons des textes issus de la production littéraire juive de l’Antiquité qui dénotent une hostilité des Juifs vis-à-vis du Macédonien : le Talmud et les Antiquités juives de Flavius Josèphe fournissent les premiers éléments sur lesquels fonder notre réflexion. Nous verrons, dans cette partie, quelles sont les raisons de l’opposition des Israélites à Alexandre ainsi que les travers qui lui sont reprochés, dans des récits juifs qui, s’ils ne sont absolument pas historiques, ne sont néanmoins pas dépourvus d’intérêt pour comprendre la nature de l’inimitié que le Macédonien peut inspirer aux Juifs. Nous verrons qu’il peut être dépeint comme colérique et vindicatif, hostile envers des vieillards, un boiteux, ou même des femmes ; et que la culture juive n’hésite pas à lui attribuer une détestable mégalomanie. Dans un second temps, nous nous intéresserons à des épisodes tirés du même terreau culturel qui expriment, au contraire, une certaine sympathie d’Israël pour le souverain grec. Effectivement, il existe également des écrits bien plus élogieux à l’égard d’Alexandre : certains sont de timides éloges, mais d’autres sont, comme nous le verrons, de véritables consécrations du Macédonien dans la culture juive. Le Talmud et le Midrash, mais aussi le livre prophétique vétérotestamentaire de Daniel sont les références auxquelles nous nous intéresserons dans ce chapitre : nous y découvrirons la consécration qui est celle d’Alexandre dans la tradition juive, preuve d’une réelle admiration des Juifs pour sa personne. Protecteur d’Israël, invité à officier au Temple en compagnie du Grand-Prêtre, voire annoncé par les Ecritures ; bien que Grec, le Macédonien est le souverain le plus révéré par la tradition juive, aux côtés du roi de Perse Cyrus. Le troisième temps de notre réflexion sera consacré à la comparaison des données historiques et archéologiques avec les récits que nous aurons vus auparavant ; nous estimons que cette étape sera à même de fournir un éclairage plus objectif sur la situation réelle des Juifs au -IVème siècle. Nous nous appuierons, dans cette partie, sur divers ouvrages présentant les avancées considérables de la recherche archéologique durant les trente dernières années, avancées qui ont permis de cerner encore davantage la réalité de la Judée à l’époque hellénistique, faisant voler en éclats certaines conceptions courantes sur l’histoire de cette région, notamment autour de la question samaritaine. Ces informations sur le contexte historique nous permettront de mieux comprendre les motivations des rédacteurs des récits susmentionnés, et l’opportunité qu’ils représentent pour les Juifs du début de la période hellénistique. Nous verrons notamment que la condition des Juifs, aux premiers temps de l’époque hellénistique, est nettement plus précaire que les textes présentés veulent bien le montrer. Enfin, la quatrième et dernière étape de notre étude ira chercher une part de la réponse à notre problématique du côté des tendances de fascination-répulsion qui caractérisent les relations entre hellénisme et judaïsme. En effet, nous estimons qu’en élargissant notre réflexion au véritable enjeu derrière les récits évoqués et l’invocation de la figure d’Alexandre, soit la possibilité ou non d’une compatibilité culturelle entre ces deux modèles culturels, nous pourrons montrer comment leurs regards respectifs sur l’étranger est plus complexe qu’il n’y paraît. Si les fondements de leurs cultures semblent parfois essentiellement opposés, nous verrons aussi le vif intérêt que l’une et l’autre peuvent, par périodes, se témoigner. En mobilisant des récits variés à même de nous informer sur les différentes manières par lesquelles Alexandre est présenté dans la culture juive ; puis en essayant de comprendre l’opportunité pour les Juifs de construire ces discours en nous intéressant à leur véritable contexte historique ; avant de voir de quelle manière Alexandre le Grand, dans la culture juive, est avant tout un symbole, une incarnation paroxysmique de l’hellénisme, nous espérons fournir à notre problématique une réponse, non pas exhaustive, mais au moins pertinente, argumentée et nuancée, digne d’intérêt du point de vue de l’étude de l’Histoire du Proche-Orient antique et des langues anciennes.